Julien M.

Bataille de génération pour révolutions du monde arabe

Le monde arabe vient de vivre coup sur coup deux révolutions. Deux peuples habitués à voir la photo de leur chef d’Etat dans les rues et les administrations, devant faire avec des restrictions sur leurs libertés, ont mis à la porte leur dictateur respectif. Quand le mouvement d’une société entière renverse un régime pourtant bien en place, une onde de choc particulière parcourt nos villes de banlieue, où de nombreux jeunes vivent avec une double culture, héritée de leurs parents venus de l’autre côté de la Méditerranée.

mix drapeaux Algérie Tunisie

Comme pour une victoire de coupe du monde. Les français ont eu la surprise de voir, lors des qualifications pour la coupe du monde 2010, des manifestations sporadiques sous les couleurs du drapeau algérien. Partis du quartier de Barbès à Paris, ou bien venues du vieux-port de Marseille, ces cortèges d’effervescence collective ont permis à toute une communauté, réunie sous les bannières du sport, de fêter l’accession de leur nation aux phases finales de la compétition mondiale majeure.

En 2011, de nouveaux drapeaux fleurissent dans les rues parisiennes et de plusieurs grandes villes françaises. Et les raisons sont cette fois bien différentes. D’abord en soutien aux manifestations et au soulèvement tunisien, ces rassemblements colorés de rouge se sont vite transformés en une expression française d’un écho des révolutions qui, telles un jeu de domino, font trembler l’ensemble du monde arabe.

Particularité de ces événements, tant pour ces acteurs que pour les nombreux observateurs : la place prise par le micro-blogging, et les réseaux sociaux, dans la structuration du mouvement, qui a conduit au départ de deux chefs d’Etat. Cela peut expliquer l’engouement rencontré en France, où depuis son téléphone mobile, il est possible de live-tweeter sur les dernières informations qui nous parviennent de Tunisie, d’Epypte et maintenant d’Algérie.

Peu de temps avant la chute de Ben Ali, je publiais un article sur Essonne Info sur la place prise par ces nouveaux médias dans le mouvement tunisien. Il s’agit bien d’une question de génération. Les principaux utilisateurs de ces plateformes d’échanges sont les jeunes, qui marquent ainsi de leur particularité cette révolution au sein de laquelle ils ont été en première ligne. De l’autre côté de la mer, une certaine jeunesse française entend les revendications de cette génération révoltée, et soutient à distance les peuples mobilisés.

Car les espérances, les envies de vivre convenablement et dignement, sont parfaitement comprises par ceux dont la famille a connu ces conditions de vie, parfois motifs de migration, et dont cousins, voisins du bled ou grand-parents restés sur place relayent au jour le jour les derniers rebondissements. Coups de fil, internet et télévision venant compléter une véritable implication morale dans ces événements.

C’est ainsi que des amis me racontent parfois des anecdotes, qui paraissent pour eux anodines, à force d’habitude. Le fait de devoir payer un backchich pour quoi que ce soit par exemple, est totalement intégré par les tunisiens de la bas comme d’ici. Une certaine forme de corruption généralisée bouche l’avenir des jeunes, à qui on explique que « si tu ne connais personne de bien placé, tu n’auras pas de travail » , et ce malgré les diplômes.

C’est peut-être là ce qui a poussé Mohamed Bouazizi, à s’immoler de désespoir. On dit souvent que la jeunesse est la plus à même de faire bouger les choses, une nouvelle fois elle l’a démontré. Comment ne pas saluer cette ferveur? Comment passer à côté d’un tel décalage générationnel? Personne ne s’attendait à ce que tout cela se déroule si vite. Et pourtant, en France, où on compte de nombreux fils et filles de Tunisiens et d’Algériens arrivés dans les années 70 et 80, on regarde de prêt l’évolution des évènements de l’autre côté de la Méditerranée.

C’est certainement pour cette raison que le gouvernement français a finalement refusé au président déchu Ben Ali de se réfugier en France. Alors que son avion personnel était déjà dans l’espace aérien français et qu’il était attendu à l’aérodrome de Villacoublay, il s’est vu interdire d’atterrir dans l’hexagone, devant faire demi-tour et aller en Arabie Saoudite.


La fête est finie

On a tendance, pendant tout le mois de janvier, à se souhaiter ses voeux. De réussite, de bonheur, de bons moments avec ses proches, mais également la santé et la prospérité. Je ne peux qu’aller dans ce sens, et profite de la plate forme Mondoblog pour souhaiter à tous les mondoblogueurs, ainsi que celles et ceux qui nous lisent, partout dans le monde et en langue française, une excellente année 2011 !

C’est dans une ambiance morose que s’est déroulé le passage à la nouvelle année 2011, et les fêtes de fin d’année qui s’y juxtaposent. Il y a quelques jours, on a appris que les Français étaient de plus en plus pessimistes. Différents sondages montrent un état de résignation en l’avenir de la part des français, et ceux-ci abordent ce début d’année de manière circonspecte.

Tout a commencé avec les intempéries survenues à plusieurs reprises en décembre. Lors de 3 vagues de froid succésives, plusieurs régions françaises, et notamment la région parisienne, centre économique et institutionnel du pays, se sont trouvées paralysées. De manière incompréhensible, on a vu se former de véritables camps de naufragés de la route, le long d’axes pourtant très fréquentés en banlieue parisienne.

Il y a quelques mois, le pays a vécu au rythme d’une mobilisation sociale sans précédent, pour un aboutissement finalement nul, ou presque. Cette énergie déployée, cet élan de contestation n’aura pas connu de débouché victorieux pour les français mobilisés, et une opinion plus que favorable au mouvement de défense des retraites.

La crise économique semble désormais plus que présente, avec un taux de chômage, notamment des jeunes, qui a atteint des sommets. L’on pourrait en rajouter sur le vent de protestation qui commence à se lever au sujet de la dernière loi sur la sécurité intérieure, la LOPPSI 2, ou bien la très probable abstention record qui s’annonce pour le scrutin des cantonales des mars prochain… mais cela nous en ferait presque oublier de terminer sur une note positive.

Ce formidable élan populaire qui se déroule en Tunisie. Malgré le sang versé et les difficultés rencontrées, ce pays est en train de vivre une période exceptionnelle de son histoire. Celle où les tunisiens ont décidé de prendre leur avenir en main. On ne manquera pas de se rappeler de ce 14 janvier 2011, date de la désormais révolution de jasmin.

Je ne manquerai pas d’en parler et d’échanger avec les mondoblogueurs à ce sujet.


Ma première semaine en smartphone

Et voilà, c’est mon tour, comme dirait l’autre. Après de multiples tractations avec moi-même, des questionnements profonds, comme de savoir si je n’allais pas basculer dans la catégorie des « geeks ». Pour tout avouer, j’étais assez anxieux à l’idée de me doter moi aussi d’un smartphone. Quand je vois l’utilisation de plusieurs de mes proches de ce genre d’appareil, j’étais en droit de m’intérroger…

Moi qui suis déjà de longues dizaines de minutes par jour au téléphone, pour de multiples raisons d’ailleurs, quand je ne suis pas en train de pianoter la fonction sms, j’ai tout d’abord pris peur de devenir complètement asocial. Je me voyais déjà, en soirée avec des amis, jeter un oeil toutes les deux minutes à mon engin, oubliant en même-temps de vivre en société correctement.

J’ai donc décidé, il y a peu, de tout de même franchir le cap, car comme on dit : « il faut vivre avec son temps ». Reconnaissons une utilité certaine pour des personnes fonctionnant beaucoup par courriel, par exemple, de ces appareils qui permettent de recevoir et de répondre à ses messages à peu prêt partout en zone un minimum urbanisée.

C’est donc d’un point de vue pratique que j’ai entrepris les recherches visant à me trouver le téléphone idéal, pour les besoins que j’en aurais.

Le IPhone : moi jamais !

Le leader incontesté de ce genre d’engins est, en France, l’appareil développé par Apple, le fameux IPhone. La technologie Mac est adaptée à un appareil de la taille d’un gros téléphone, pour une utilisation très variée. C’est ce point qui a été chez moi, facteur de rebuttement. Quand je vois toutes les applications qu’il existe, du moins celles que l’on me montre, nul doute que cela aurait pu chez moi provoquer un excès d’utilisation « geek » de cet outil.

Mon choix s’est donc porté sur le BlackBerry 9700 Bold – rien que ça ! – un smartphone disposant d’un vrai petit clavier Azerty.

Petite prise en main, dans les premiers jours, et premières tentatives d’écriture de sms. Là où je pouvais me servir d’une seule main avec mon vieux Nokia, je dois, pour être efficace dans l’écriture, me servir de mes deux mains. Le résultat, au bout d’une semaine, est surprenant. J’enchaine les messages de manière assez rapide.

Côté téléphone, c’est assez simple d’utilisation. Je peux même ajouter de petites photos aux gens de mon répertoire.

Je me suis dis que j’allais procéder par étape, et dans un premier temps ne pas encore surfer sur internet, avec toutes les possibilités offertes. Après une semaine, je commence doucement à m’habituer. Un ami m’a par ailleurs installé la fonction BlackBerry Messenger, sorte de messagerie instantanée conçue pour les utilisateurs de la marque. On avance dans la technologie, mais pas trop vite non plus !

Prochain épisode : « Je me suis mis à twitter »


Régler la question des discriminations par en bas

Comment régler la question de la lutte contre les discriminations? Institutions, associations, politiques, beaucoup sont ceux à se pencher régulièrement sur cette question. A Evry, c’est une association locale de jeunes, Réagir, qui a souhaité traiter la question en organisant une journée de ciné-conférence, le 21 octobre dernier.

Préjugé, prénotion ou a priori, nous avons tous nos impressions sur les personnes que nous rencontrons. Petits, grands, gros, noirs, handicapés, musulmans, femmes : pour toutes ces motifs, et d’autres encore, chacun peut être victime d’un ou plusieurs de ces critères qui va l’écarter par rapport à quelqu’un d’autre. Que cela soit pour obtenir un emploi, ou encore un logement. Mais pénaliser quelqu’un en raison de critères non objectifs est préjudiciable. En France, c’est un délit, il s’agit d’une discrimination.

Depuis 2005, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) est chargée de mettre en place des dispositifs nationaux et de répondre aux victimes des discriminations. Parallèlement, des collectivités se dotent de délégations et de services « égalité des droits – lutte contre les discriminations ». Elles financent des programmes locaux, visant à la sensibilisations du grand public. Sur le terrain, de multiples acteurs tentent au quotidien de travailler pour un meilleur vivre ensemble et une compréhension mutuelle. Ce sont les éducateurs, les travailleurs sociaux, mais également les militants associatifs, au coeur des quartiers.

Dans cette optique, c’est à Evry, au théâtre de l’Agora, scène nationale, que l’association Réagir invitait, le 21 octobre dernier, plusieurs professionnels, associatifs et personnalités à venir discuter d’une nouvelle manière d’étudier la question des discriminations. Autour de la diffusion de films français et québécois, il s’agissait d’échanger d’une manière singulière, en se servant des exemples fournis par ces formats vidéos.

Trop peu d’initiatives sur les questions de discriminations émanent directement des personnes concernées, dans les quartiers. Là où on souffre de son patronyme, de son origine sociale ou géographique, de ses caractéristiques ethniques. Si il faut saluer ce genre de journée, nous pouvons déplorer qu’elles restent trop peu nombreuses et marginales. Du côté des pouvoirs publics, la tendance ne semble pas aller vers une confiance de ces acteurs de terrain, soupçonnés bien souvent de manque de sérieux dans ce qui est mis en place. Le choix se porte plus vers de grosses structures nationales, abonnées aux débats télévisuels, mais en réalité éloignées des problèmes concrets que vivent les gens au jour le jour.

Ce constat ne peut que continuer à creuser le fossé qui existe entre deux France. Celle qui a le droit de citer, y compris sur les questions liées aux quartiers. De l’autre, une France silencieuse, qui ne trouve pas le moyen de prendre la parole. Ce décalage peut s’expliquer par le manque d’interlocuteurs rencontrés dans les quartiers. Mais le rôle des institutions n’est-il pas justement de tout faire pour entendre les urgences qui s’expriment chez les plus fragiles socialement? Car tant que certains français se sentiront appartenir à cette seconde zone, la société ne pourra pas avancer convenablement.

Tout comme l’association Réagir, c’est peut-être directement dans les quartiers, auprès des acteurs de terrain, qui vivent au jour le jour ces problématiques, que les réponses peuvent être trouvées. Sans solution miracle, mais par un travail au quotidien, les pouvoirs publics pourraient faire d’avantage confiance aux initiatives par le bas.

Un rendu succin de cette initiative est disponible ici


Avis de malaise social

La France semble doucement sortir d’un mois et demi de mouvement social très particulier. Vu de l’étranger, peu ont compris que notre pays avait passé un cap en terme de dureté de la confrontation sociale. Malgré les appels au calme et un certain essouflement de la mobilisation sur une longue durée, une nouvelle fois, des centaines de milliers de personnes ont défilé, dans toute la France et les collectivités d’outre-mer. Que se passe-t-il vraiment en France?

Alors que le parlement a définitivement adopté la réforme des retraites, après des votes au Sénat et à l’Assemblée Nationale, la semaine dernière, 2 millions de personnes (530 000 selon la police) ont manifesté dans les 230 cortèges prévus dans le pays, ce jeudi 28 octobre.

Le passage de 60 à 62 ans de l’âge de départ en retraite, et à 67 ans pour un départ à taux plein a, selon les différents sondages, rencontré une opinion publique défavorable à 70%. C’est sur ce point précis que se sont dans un premier temps concentrées les centrales syndicales, à l’unisson pour demander une autre réforme des retraites.

Au fil des dates de rassemblement, des manifestations, le ton des contestataires s’est rapidement transformé. Cette mobilisation a en effet découché sur une cristallisation des mots d’ordre vers une critique ouverte du chef de l’Etat, symbolisé comme « président des riches ». Nicolas Sarkozy, élu président de la République il y a 3 ans et demi, connaît désormais une défiance jamais révélée pour un président en exercice. Le tout semble aujourd’hui avoir atteint une telle ampleur, qui, sans porter pas de nom, plane telle une ambiance générale sur le pays.

Un air de morosité

Vu de l’étranger, cette situation peut paraître incompréhensible voire abbérante, mais il existe un profond malaise au sein de la société française. La colère avec laquelle s’emploient les opposants en tout genre de M. Sarkozy, à s’en revendiquer et le faire savoir, rappelle les fixations passées sur certains chefs d’Etat, tels Georges W. Bush aux Etats-Unis ou Silvio Berlusconi en Italie.

Cette colère mise à jour mais non entendue, laisse une certaine forme d’amertume dans le pays. Le monde du travail est désormais furieux contre un pouvoir qui ne veut pas entendre l’ensemble des organisations syndicales, qui n’ont eu de cesse, pendant le conflit, de prôner le retour au dialogue.

Un dialogue également rompu avec les jeunes. Partout, et notamment dans les quartiers populaires, les lycéens ont tenu à montré leur solidarité avec le monde du travail en lutte. Parfois de manière brouillonne, ces mobilisation plus spontanées ont entrainé quelques tensions autour de différents établissements et au sein de certaines villes.

Une jeunesse abattue mais pas résignée

Cette jeunesse mobilisée, bien que critiquée, n’en est pas moins demeurée enthousiaste et lucide. Elle qui grandit avec la crise, sait que les temps vont devenir durs. Mais elle conteste, n’accepte pas l’ordre établi et ce qu’on lui offre comme avenir.

Dans les quartiers, ou le taux de chômage atteint jusqu’à 40%, cette mobilisation a parfois pris des formes violentes. Comme un reflet des conditions d’existence, tout une partie de la jeunesse n’arrive pas à y déployer ses ailes. Que d’étonant de voir, dans ces mêmes quartiers, l’abstention flirter avec les 70%, dans plusieurs bureaux. Les personnes qui y vivent sont délaissés, la crise les touche de plein fouet.

Chez les jeunes, les perspectives d’avenir manquent cruellement. L’insécurité, mise en avant médiatiquement, laisse la place à une insécurité sociale grandissante. Comment obtenir un premier boulot, un logement, des perspectives d’avenir?

Le climat de peur actuel met en exergue le sentiment raciste lattant. Les préjugés reprennent alors toute leur place, et un phénomène jamais vu de discrimination prend forme. Les structures sociales et les acteurs du vivre-ensemble, trop peu nombreux, sont débordés par toutes les situations rencontrées.

Le manque de confiance en la chose publique, le monde politique, médiatique a atteint un stade jamais vu jusqu’alors.

Si le mouvement de contestation sociale venait à se terminer de la sorte, un profond sentiment de dégout prendrait une place plus grande dans tout un pan de la société. Cela ne présage rien de bon pour les mois à venir.